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24 juin 2021 - Actions Traitements, association de patients VIH et co-infections
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Source : Libération

C’est le 5 juin 1981, dans la revue «Morbidity and Mortality Weekly Report», qu’apparaît la première trace scientifique de ce qui va devenir le VIH, comme le raconte le professeur Willy Rozenbaum, futur co-découvreur de la maladie, alors médecin à Paris. Et qu’en est-il de la naissance officielle du Covid-19 ?

Nous sommes le 5 juin 1981, jour de la parution aux Etats-Unis de la dernière livraison de la revue du CDC (Centers for Disease Control), appelée Morbidity and Mortality Weekly Report. C’est la bible de l’épidémiologie mondiale. «En France, on devait être tout au plus cinq personnes qui recevaient la revue du CDC», nous avait raconté le professeur Willy Rozenbaum. Alors jeune médecin à l’hôpital Claude-Bernard, dans le nord de Paris, il travaille sur les maladies transmissibles. «Et il faut deux jours, en moyenne, pour qu’arrive sur mon bureau cet austère relevé hebdomadaire. C’est vite lu», ajoutait-il. «Il y a juste huit pages, et ce jour-là, je parcours un article au titre on ne peut plus technique : « Pneumocystis Pneumoni Los Angeles »

Qui peut alors imaginer que ce bref compte rendu allait marquer l’histoire ? C’est en effet la première publication évoquant ce qui allait devenir le sida. Il y est fait état de cinq cas graves d’une pneumonie particulière. Des cas observés entre octobre 1980 et mai 1981 dans trois hôpitaux de Los Angeles : les malades sont des hommes jeunes, entre 29 ans et 36 ans, tous homosexuels. Willy Rozenbaum lit l’article, et cet ancien réanimateur se dit qu’il a déjà eu affaire à ce type de pneumonie. L’après-midi même, il consulte : «Arrive alors un patient, un steward. Ce qui me frappe d’abord, c’est qu’il me demande s’il peut entrer avec un ami. Puis il me raconte une histoire de toux, de fièvre prolongée, de diarrhées. Je lui fais faire une radio qui me montre une image diffuse. Et là, immédiatement, je fais ce lien avec l’article que j’ai lu le matin même.» Le steward est hospitalisé et, deux semaines plus tard, le diagnostic de pneumocystose est fait, peu banal à l’époque.

Une maladie regardée avec dédain

Quarante ans et plus de 40 millions de morts du VIH plus tard, la planète est confrontée à une tout autre épidémie. Dresser un parallèle est évidemment tentant, mais les différences sautent aux yeux. Attardons-nous sur deux d’entre elles. D’abord, dans la prise en charge. Au tout début du sida, ce ne sont pas les grands mandarins de l’époque qui s’intéressent à cette maladie bizarre, mais des jeunes, à l’image de Willy Rozenbaum, plutôt en marge, militants souvent. Ils aiment le travail en groupe et c’est d’ailleurs cela qui leur permettra d’isoler ce nouveau rétrovirus les premiers. A l’époque, les grands noms de la virologie et des maladies infectieuses regardent avec un brin de dédain cette maladie «de pédés», et de «toxicos» (1). Ensuite, ce n’est que bien plus tard, en creusant les mystères de l’épidémiologie et de la génétique, que l’on trouvera traces des tout premiers cas. Une équipe internationale a ainsi reconstitué scientifiquement dans le temps et dans l’espace le début de l’épidémie de sida. Montrant ainsi sa lente propagation à partir de l’actuelle République démocratique du Congo et de sa capitale, Kinshasa, à partir des années 20, principalement par le biais du chemin de fer.

Dans le cas du Covid, quand peut-on dater la première publication scientifique ? A quel moment remontent les premiers cas ? Il est encore bien difficile d’être précis. Selon le site Covid Reference, c’est le jeudi 12 décembre 2019, à Wuhan, que les responsables de la santé commencent à enquêter sur les patients atteints de pneumonie virale. Le 30 décembre 2019, Li Wenliang, un ophtalmologiste de 34 ans à Wuhan publie, un message sur un groupe WeChat alertant ses collègues médecins d’une nouvelle maladie à coronavirus dans son hôpital. Il signale que sept patients ont présenté des symptômes similaires au Sras et été placés en quarantaine. Le lendemain, le 31 décembre 2019, la police de Wuhan annonce qu’elle enquête sur huit personnes soupçonnées d’avoir répandu des rumeurs sur une nouvelle épidémie de maladies infectieuses. Ce 31 décembre encore, la Wuhan Municipal Health Commission signale 27 patients atteints de pneumonie virale après avoir fréquenté ce marché de Huanan SeaFood. Sept patients sont gravement atteints. Leurs manifestations cliniques consistent principalement à de la fièvre et des difficultés respiratoires chez certains d’entre eux. Les radiographies thoraciques objectivent une infiltration pulmonaire bilatérale. Le rapport conclut que la maladie est évitable et contrôlable. Et, toujours le 31 décembre, l’OMS en est informée.

On le voit, il est extrêmement délicat d’établir une date précise de la première publication, tant, aujourd’hui, entre les sites et les réseaux sociaux, les règles de la communication scientifiques ont été bouleversées.

Le nombre de personnes sous traitement a triplé depuis 2010

Retour au sida. La semaine dernière, comme elle le fait deux fois par an, l’Onusida a fait le point sur la situation actuelle de l’épidémie. Et l’air de rien, elle dresse un bilan qui appelle à une comparaison implicite avec le Covid. Ainsi, ce dernier rapport montre «que les pays dotés de lois et de politiques progressistes et de systèmes de santé forts et inclusifs ont obtenu les meilleurs résultats contre le VIH». Ainsi, «dans ces pays, les personnes vivant avec le VIH et touchées par le virus ont de meilleures chances d’avoir accès à des services efficaces de lutte contre le VIH, y compris son dépistage, la prophylaxie pré-exposition (médicament permettant d’éviter une contamination au VIH), la réduction des risques, la délivrance d’un traitement de lutte contre le VIH pour plusieurs mois, ainsi qu’un suivi et des soins cohérents et de qualité».

Plus généralement, le rapport note que le nombre de personnes sous traitement a plus que triplé depuis 2010. «En 2020, 27,4 millions des 37,6 millions de personnes vivant avec le VIH suivaient un traitement, contre seulement 7,8 millions en 2010. On estime que le déploiement d’un traitement abordable et de qualité a permis d’éviter 16,2 millions de décès depuis 2001.» Des décès qui ont reculé en grande partie grâce à la démocratisation de la thérapie antirétrovirale. «Des progrès ont également été réalisés dans la réduction des nouvelles infections au VIH, mais ils ont été nettement plus lents. Elles ont ainsi reculé de 30% depuis 2010, avec 1,5 million de personnes nouvellement infectées par le virus en 2020 contre 2,1 millions en 2010.» Le rapport conclut en rappelant de nouveau «que les pays dotés de lois punitives et qui n’adoptent pas une approche basée sur les droits en matière de santé représentent 62% des nouvelles infections à VIH dans le monde».